« Un liquide brûlant se répandit sur son front,
pénétra à l’intérieur de lui,
consuma tout ce qu’il y avait à consumer,
rendit au néant tout ce qu’il n’aurait pas dû être,
et le laissa nu, comme un nouveau-né,
dans l’aura absolue de ce qu’il était devenu. »
Baptême de Sergueï Plotkine,
Cosmos incorporated, p. 525
Maurice
Georges Dantec est mort le samedi 25 juin 2016 à Montréal d’une crise
cardiaque. Il était l’un des écrivains français (devenu canadien) les plus lus dans le monde. C’était
un écrivain chrétien qui se sentait de plus en plus mal à l’aise dans le monde
globalisé ultra-moderne. Dans ses derniers ouvrages l’auteur du roman Les racines du mal était de plus en plus
à la recherche d’une voie de salut pour l’humanité. Sa pensée néo-gnostique était
peu prise au sérieux et il en souffrait. Il y a quelques années, pour tenter de
remédier à cette injustice, j’avais décidé d’écrire une brève analyse de son œuvre
et je lui avais envoyée. Après l’avoir lue,
il m’avait encouragé à la publier. Mais j’avais préféré alors attendre un peu en
attendant de l’enrichir.
L’annonce
de son décès me pousse à publier cet article sans prendre le temps de le
modifier substantiellement. Pour un dernier hommage et comme témoignage de
ma vive reconnaissance.
Maurice G. Dantec, polémiste génial et
insupportable
Dans
quelques dizaines d’années les historiens de l’avènement de la nouvelle
identité chrétienne œcuménique ne manqueront sûrement pas d’établir des
convergences entre les outrances de la pensée de Maurice Georges Dantec, les penseurs
néo-gnostiques comme Annick de Souzenelle, et le prophétisme d’un Olivier
Clément ou d’un Rowan Williams, tous acteurs du renouveau chrétien
contemporain.
Homme
du XXIe siècle, Dantec nous renseigne sur les potentialités insoupçonnées d’un
christianisme trans-moderne mais aussi sur le renouveau, étonnant et inquiétant à
la fois, de la pensée gnostique. Dantec tout d’abord était un écrivain, un
vrai. La plupart de ses romans ont été publiés à plusieurs dizaines de milliers
d’exemplaires par de grandes maisons d’édition.[1] Bien
qu’il ait été critiqué de toutes parts, personne n’a contesté véritablement le
talent littéraire de cet écrivain à la plume fleuve (chacun de ses romans
compte au moins 800 pages !). Dantec a inventé un nouveau style littéraire
dit ‘transfictionnel’ entre polar et traité théologique, science-fiction et
roman philosophique. L’héritier de Proust, de Deleuze et de la science fiction
américaine (Dick, Ballard, Spinrad,…), a mis une croix sur la narrativité
classique, pour la substituer par un récit « schizo-critique »[2]. Les
frontières entre l’auteur, ses héros, ses modèles, ses lecteurs ont explosé.
L’auteur, chez Dantec, n’est plus « présent partout mais visible nulle
part » comme chez Flaubert. ‘La réalité objective et la réalité subjective
(je devrais dire les réalités), écrivait
Dantec, sont contiguës, coévolutives, enclavées l’une dans l’autre, au sein de
ces mondes interfaces, artificiels et thaumaturgiques des mass média, ces
technologies de séduction et de destruction dans lesquelles nos consciences
semblent pouvoir survivre, quoique avec beaucoup de difficultés. »[3]
Cette
narration étrange creuse jusque dans les profondeurs du nihilisme, qu’il
considérait comme diabolique, du monde contemporain. Les relations entre les
personnages, comme dans Villa Vortex,
ne sont plus des rapports de production mais des ‘rapports de rapport de
destruction’.[4] Mais Dantec, lecteur de la
Kabbale, parvint aussi à s’approcher des plus grands mystères de la corporéité
méta-individuelle, lorsque le ‘je secret’ s’efface pour faire jaillir le Verbe,
lorsque la trinité de l’écrivain, de l’Artefact (transubstantiateur intime) et
du lecteur s’unissent dans une noce planétaire. « Tout homme vit dans une
trinité hypostatique, écrit-il, car s’il est fait à l’image de Dieu, il est
fait à l’Image des Trois Personnes, et comme dans la trinité divine, la trinité
des hypostases humaines conduit au mystère même de la singularité individuelle,
indivisible, et qui divise tout, cette synthèse disjonctive qui opère tel un
réseau de coupures, une ‘machine’ singulière entre les trois personnes
hypostatiques. Le cerveau est trinitaire. »[5]
Dantec
fut aussi un auteur polémique, un Vassili Rozanov des lettres françaises, qui
craint plus que tout le monde moderne. Il suffit de lire les ouvrages de
Charles Taylor pour se convaincre qu’il y a bien aujourd’hui un malaise de la
modernité caractérisé par la crise de la raison instrumentale déchaînée,
l’asphyxie existentielle face au désenchantement du monde, et la violence
croissante du narcissisme contemporain.[6]
Certains intellectuels en tirent comme conclusion que le temps est venu de
s’abandonner au libertinage. D’autres cherchent à s’en prendre au capitalisme
post-libéral avant même d’avoir remis en question, selon Dantec, leurs propres
responsabilités dans la furie communiste du XXe siècle. La plupart
s’accommodent de cette situation en prônant un néo-athéisme héroïque fondé sur
les dernières vertus encore présentes, celles de l’authenticité et de la
sincérité. A tous ces ennemis, représentés essentiellement par les milieux
gauchistes révolutionnaires devenus quinquagénaires bourgeois médiatiques
(Dantec n’hésitait pas, qui plus est, à donner des noms : Jean-François
Kahn, Eric Hobsbawm, Noam Chomsky, etc…) – sans compter les thuriféraires du
capitalisme marchand -, Dantec disait : ‘Je suis vivant et vous êtes
morts’.[7]
Dantec
ridiculisait ces milieux décadents et/ou apôtres d’un « discours lénifiant
et humanitaire qui invoque sans cesse l’intégrité, la transparence, le naturel
et l’authenticité » mais sans remettre en question les fondements de notre
civilisation mortifère. Ces gens là, écrivait-il, ne souhaitent que ‘le calme
plat du désert télévisuel publicitaire, des raves humanitaires et des parades
techno, ce désert qui croît autour de nous à la mesure de notre expansion, et
dont nous sommes si fiers’.[8] Mais
Dantec fit un pas de plus lorsqu’il assura que les tenants de la matriarchie
postrévolutionnaire, les théoriciens de la ‘liberté sexuelle’, avaient une
responsabilité terrible : la marche quasi-inéluctable du monde, - à moins
d’une conversion sans conditions au Christ -, vers une guerre civile planétaire.
Mal
à l’aise en France, où il a été taxé d’écrivain d’extrême gauche puis d’extrême
droite[9], ce
Léon Bloy de la post-modernité a choisi de s’exiler en 1998 à Montréal au
Québec. Mais là -bas aussi il a été accueilli avec dédain par l’intelligentsia
locale (formée selon Dantec à l’école de ‘la libération nationale-sociale
crypto-marxiste’). Effaré par le siècle du « bédouin » Oussama Ben
Laden, de l’homo festivus et de
Thierry Ardisson – l’un des symboles pour lui de la décadence de la télévision
française -, Dantec situa certains de ses romans vers la fin du XXIe siècle afin
d’ouvrir les yeux de ses lecteurs éberlués sur l’apocalypse en cours de
formation.
Maurice G. Dantec, écrivain chrétien et
gnostique
Mais
Maurice G. Dantec, écrivain gnostique, était aussi aimanté par l’Eglise comme l’Epouse
de l’Agneau, comme la femme vêtue de soleil qui apparaît à la fin des temps
dans le livre de l’Apocalypse. D’une certaine façon on pourrait dire que sa
conversion au Christ fut l’un des signes annonciateurs de la fin de l’ultra-modernité.
Se pourrait-il que cette époque ‘globale’, ‘bio-politique’,[10]
New-Age, violente, convulsive, cataclysmique puisse devenir un jour une époque
‘œcuménique’, trinitaire, eucharistique ?
Pour
Dantec les hommes d’aujourd’hui, ‘ces petits hommes terminaux’, avaient une
vision du Christ ‘qui ferait pleurer de misère les auteurs de Bécassine’.[11] Les
post-humains, ‘sursinges instruits’, sont donc réduits à se fabriquer eux-mêmes
des religions à la carte, dans un méga-marché composé des rayons scientologie,
catholicisme, Moon, orthodoxie orientale, Hare Krishna, etc... Or, selon lui,
le Christ n’est pas venu apporter la tranquillité du Grand Inquisiteur, ou
comme on dirait aujourd’hui la sérénité de la ‘méditation sexo-zodiacale’, mais
le Glaive, le Saut absolu. C’est pourquoi ‘le Christ est un météore Terminator
d’une haute dangerosité pour notre société (im)monde’.[12]
Certes
Dantec fustigeait ‘l’œcuménisme panthéiste baba cool des épiscopats modernes’[13]
lorsqu’ils en viennent à oublier le différend théologique de base entre le
Coran et les évangiles. Mais la thèse du pape Benoît XVI à Ratisbonne affirmait
précisément que ce goût retrouvé de la Vérité permettra à nos sociétés d’éviter
le choc des civilisations et de retrouver un dialogue profond et
inter-dynamique avec les courants les plus spirituels des grandes religions. Il
aurait suffi simplement à Dantec d’ajouter à sa radicalité, si proche de celle
des auteurs de Radical Orthodoxy,[14] des
paroles de patience, de paix et d’amour, et à sa foi de feu, un enracinement
dans la Tradition ecclésiale, patristique et
post-confessionnelle…D’ailleurs Dantec n’hésitait pas non plus à dire qu’il est
un ‘catholique d’avant les schismes’, et que la seule issue pour l’Europe et
pour le Monde aujourd’hui se situe dans ‘la réunification méta-critique du
christianisme’. Dantec rêvait de l’avènement d’une 4e Rome qui
intègre les 3 premières, afin de faire surgir ‘l’avènement du Corps-Christ au
sein de l’Homme’.[15]
Entre
1986 et 2001 la modernité comme paradigme de civilisation, déjà mise à mal par
les camps de la Kolyma et de Ravensbrück dans les années 1940, est entrée dans
les derniers spasmes de la mort. Après Tchernobyl, la chute du mur de Berlin,
la révélation des crimes du passé, - comme dans le film La vie des autres (2006) sur le système d’espionnage qui régnait en
Allemagne de l’Est à l’époque de Honecker -, l’idéologie communiste, fruit du
rationalisme moderne, a perdu toute légitimité. Mais les attentats islamistes
du 11 septembre 2001 aux USA, l’entrée la même année de la Chine dans
l’Organisation mondiale du commerce, le refus des Etats-Unis de ratifier les
accords de Kyoto… ont également conduit à une prise de conscience ‘globale’ que
c’est toute la gouvernance mondiale qui est à revoir, et donc tout le droit
international, soit l’un des principaux piliers de la pensée moderne. Nous
sommes donc entrés dans une période post-moderne, ‘globalisée’, complexe,
inter-dépendante, ultra-violente, dans laquelle les coordonnées de l’espace, du
temps, et de la conscience ont pris une nouvelle configuration. Cette époque
n’est déjà plus caractérisée par la séparation claire de la foi et de la
raison, par l’exil de la toute puissance transcendante, et par l’instauration
tranquille du droit dit ‘naturel’.
Pour
prendre ce dernier exemple, comme l’écrit Mireille Delmas-Marty, professeur au
Collège de France, à l’époque moderne ‘la raison universelle restait du domaine
des idées et le droit du domaine des pratiques. Le droit, essentiellement
relatif, pouvait ainsi rester attaché à la souveraineté de chaque Etat. Cette
conception inspire aussi le droit international classique, attaché à une
stricte égalité entre Etats souverains.’[16] Mais
avec la Déclaration universelle des droits de l’Homme de 1948, l’instauration
progressive d’un droit d’ingérence dans les affaires d’un Etat souverain, la
médiatisation des tortures pratiquées par les Etats et la création d’un Tribunal
Pénal International (soit le désir de rendre normatives les valeurs
universelles), le relativisme du droit positif a commencé à s’effriter. A sa
place un droit ‘constructiviste’ inspiré de Habermas et de Rawls prend forme.
Non pas fondé sur le droit de l’Etat le plus fort, ni sur une vision unifiée
d’un universalisme philosophique, il vise de façon pragmatique ‘un accord
progressif à mesure que les questions concrètes se posent et que des solutions
émergent au confluent des traditions les plus diverses, fût-ce au prix de
malentendus provisoires’.[17]
Mais
cette époque globale, multi-polaire, éclatée, sera aussi, selon de nombreux
penseurs tels que le pape Benoît XVI, l’archevêque Rowan Williams ou Olivier
Clément, de plus en plus caractérisée par une bi-polarisation principale entre
pensées fondamentalistes et pensées relativistes, pensées séduisantes et
pensées orthopraxiques, mais aussi entre pensées du Même (sans ouverture à la
transcendance personnelle) et pensées de l’Autre (sans unité possible)[18]. Et
c’est à mesure que le monde en prendra conscience que pourra se produire une
synthèse cohérente, alliance post-idéologique entre la foi et la raison,
redéfinition sapientielle du droit naturel, nouveau cycle politico-ecclésial
fondé sur la responsabilité, le consensus contextuel et la mutualisation des
biens.
Maurice G. Dantec, un passeur entre deux
époques ?
Maurice
Dantec se situe entre ces deux époques, ou plutôt entre ces deux niveaux de
conscience, c’est là ce qui le rend passionnant.
D’un
côté il est un héritier du siècle des « Lumières ». Son père
communiste lui a transmis très jeune son athéisme et sa fascination pour Youri
Gagarine. Il est fasciné par les progrès de la science, tout en assimilant la
technique, « manifestation de l’Opérateur ontologique de division infinie »,
au diable en personne. D’un autre côté Maurice Dantec, à la suite d’une longue
quête personnelle marquée par sa participation à un groupe rock tendance punk,
sa lecture de la Kabbale, d’Abellio et de saint Grégoire de Nysse, a demandé et
reçu le 16 février 2004 le baptême dans l’Eglise catholique romaine de Montréal.
Le résultat, c’est que Dantec, - qui demande immédiatement la réouverture du
Saint Tribunal de l’Inquisition ! -, s’affiche comme « un catholique
infréquentable », comme un hérétique
du modernisme, comme un lecteur critique du Vatican
II.
De
même Maurice Dantec est terrorisé par le terrorisme islamiste. Il polémique à
outrance ce sujet en plaçant tous les musulmans dans le même panier[19] et
n’hésite pas à « punir tous les intellectuels pro-palestiniens d’un mois
de vacances à Gaza ». Mais Dantec est aussi celui qui, porté par la
radicalité de sa foi, n’hésite pas à appeler les choses par leur nom. Ayant
depuis longtemps abandonné le laïcisme sectaire de la République Française à
ses « Êtres suprêmes de pacotille », l’écrivain français est
conscient que l’interdiction du port du voile dans les écoles de France n’est
qu’une fragile ligne Maginot face à l’envahissement prochain de toutes les
forces religieuses refoulées par notre modernité depuis Voltaire et Lénine.
Dantec
est tellement fasciné par la violence, cette caractéristique la plus profonde
de la pensée moderne selon John Milbank, qu’il n’hésite pas lui-même à imaginer
les tortures les plus affreuses contre tous ces ennemis et à se solidariser
avec Bush lors de la guerre en Irak (contre la position de la quasi-totalité
des Eglises chrétiennes en Amérique). Dans son roman Les racines du mal il met en scène un tueur en série mal aimé par
ses parents. Dans Villa Vortex il
s’agit d’un tueur roboticien incarnation de la technique métaphysique. Dans Le Monde de ce Prince (Artefact), nouvelle la plus insoutenable
de Dantec, l’auteur décrit des tortures abominables en citant Saint Jean :
‘Bien plus, l’heure vient où quiconque vous tuera pensera rendre un culte à
Dieu’ (Jn 16, 2). Dantec, dont le christianisme est récent, ne s’est pas libéré
de cette idée anti-manichéenne qu’on trouve dans la Kabbale, selon laquelle
‘l’Adversaire est aussi l’instrument du Dieu Unique et Absolu’.[20] On
est loin de saint Jacques : « Dieu ne peut être tenté de faire le mal
et ne tente personne. Chacun est tenté par sa propre convoitise qui l’entraîne
et le séduit. » (Jc, 1, 14-15)
Mais
Dantec est aussi l’un des rares penseurs à comprendre aujourd’hui que
l’Apocalypse n’est pas un mythe pour théologiens érudits et marginaux. Elle est
une réalité vivante, une composante essentielle de notre espace-temps. Aussi
Dantec, le Dostoievski de la post-modernité, sait de quoi il parle lorsqu’il
écrit que seul le pardon, ‘nom de la Grâce’, permet de se libérer de ce monde
déchu et d’entrer dans le chronotope du Royaume. C’est pourquoi, combien même ses
prophéties sont écrites sous l’emprise de toutes sortes de drogues, combien
même la polémique entraîne souvent ses paroles au-delà de ses pensées, il
convient d’écouter avec attention les propos de cet écrivain génial sur notre modernité,
sur l’organisation du vivant, et sur la musique rock contemporaine.
Le monde de la post-modernité chez
Dantec
Fasciné
par la série des films Matrix, disciple de Günther Anders, élève de Gilles
Deleuze et de Guy Debord, lecteur de Barbey d’Aurevilly et de Léon Bloy, Dantec
nous décrit le monde préparé par la post-modernité. Il n’hésite pas à nous
raconter les meurtres les plus pervers de tueurs en série, les lâchetés les
plus hideuses de la civilisation européenne face au monde islamiste, et les
conséquences les plus dramatiques de la transformation de notre rationalité en
pensée technologique. L’écrivain français considère tout simplement que ‘nous
sommes probablement à la fin d’un cycle humain, analogue à celui qui se termina
avec le Déluge’.[21] Aussi, comme aucun évêque
en chaire aujourd’hui dans le monde, il appelle le monde en hurlant à se
convertir au plus vite au christianisme.
Dantec
est très certainement injuste et ultra-subjectif lorsqu’il traite de la société
européenne contemporaine. Et pourtant on ne peut pas ne pas s’accorder avec lui
que la violence des banlieues des grandes mégapoles de France atteint des
sommets inégalés. Bien avant les flambées de violence des années 2006-2007,
Dantec notait dans son journal des extraits de correspondance de jeunes des
banlieues tirées de leurs sites internet (comme www.macite.net).
Le résultat, difficilement compréhensible tant la langue utilisée est
primitive, est hallucinant de violence, de vulgarité et de machisme.[22] Le
pire est, comme l’écrit Dantec, qu’en « Ripoublika franska » aujourd’hui,
aucune justice n’est rendue aux victimes de ces nouveaux Barbares de l’époque
atomique.
De
même son avis de décès de l’université française, morte avec la France entre
1940 et 1968, pourra paraître sévère. Il est difficile cependant de ne pas
admettre que ses prophéties se réalisent sous nos yeux. L’Université française
a banni tout enseignement du religieux de ses facultés (sauf dans quelques rares
ilots comme à l’EPHE), et ses corollaires : amour de la liberté, goût du
risque, sens de l’ascèse, désir de découverte, imagination, etc…. Tout esprit
libre souhaitant enseigner à l’université aujourd’hui se doit absolument de
suivre un cursus honorum aboutissant
aux goulots sévèrement contrôlés par la Matrice des concours du CAPES et de
l’Agrégation. L’Université a dû accueillir par ailleurs ces 30 dernières années
des hordes d’étudiants (passage de 200 000 à plus de 2 millions
d’étudiants) sans que les moyens pédagogiques et financiers n’aient accompagné
ce passage (alors que la dette publique de la France en euros est passée elle
de 130 milliards en 1975 à 2148 milliards en 2016 !).
Si
bien que le système d’enseignement supérieur est devenu encore plus
oligarchique en réservant à ses élites les grandes écoles, habilitées à
organiser un concours d’entrée tout autant codé, et ultra sponsorisées. Les
étudiants terrorisés par le chômage et ne disposant d’aucune ressource
spirituelle capables de leur donner les vertus nécessaires sont eux-mêmes les plus
hostiles à toute velléité de réformes que tente régulièrement l’Etat
républicain pour se donner bonne conscience. Dantec le dit avec un humour
mordant, l’université qui a fait du positivisme républicain son Livre saint,
qui a érigé Auguste Comte, Charles Darwin, Andy Warhol et Sigmund Freud en
nouvelles divinités tutélaires, et qui n’a proposé à la corporation de l’universitas comme seule forme de vie
communautaire que les syndicats post-marxistes, ne pouvait pas ne pas en subir
toutes les conséquences. «L’Université, écrit-il, sera peu à peu remplacée par
une branche de l’industrie de l’art et des loisirs, la division spécialisée
d’un consortium de musées, de zoos et de parcs à thèmes. Il sera interdit de
lancer de la nourriture aux professeurs d’art et de philosophie ».[23]
Il
y a du prophétisme chez Dantec. Les attentats du 11 septembre rôdent très tôt
dans son œuvre. Dans son Laboratoire de
catastrophe générale rédigé avant les événements il pressent le coup de
force.[24] Le
11 septembre 2000 à 7h52, il note de Montréal son « irrépressible accès de
larmes entrecoupé de pauses d’une mélancolie extrême (…) Je me dis que la
Vierge Marie laisse échapper un chapelet de larmes sur son invisible visage. ».
Dans Villa Vortex, rédigé peu après
les attentats, il les intègre à la trame de son roman. Dans Vers le nord du ciel, ils constituent le
noyau de son récit. Dans la tour du World Trade Center, à 8h46, l’Apocalypse a lieu.
Les cavaliers se succèdent. Et le héros de Dantec, au nom de sa fille Lucy
Skybridge, décide de lutter et parvient à s’extraire avec elle de la tour en
feu. On apprendra plus tard qu’il s’agissait en fait d’un déséquilibré mental
interné dans un Centre de recherche neuro-psychiatrique. Mais le récit a produit
son effet. Pour Dantec les attentats du 11 septembre ne sont qu’un épiphénomène
annonciateur d’un conflit bien plus violent entre la rationalité moderne et les
assauts démoniaques de la déraison, et dont le fruit n’est autre que « la
première guerre civile planétaire »[25].
C’est
pourquoi Dantec ridiculise tous les journalistes post-soixante-huitards, tous
les ‘sociologues du piercing’, prônant le fondamentalisme soft de la pensée relativiste. Ces journalistes du magazine
culturel branché parisien les Inrockuptibles
cherchent à le faire passer pour un dangereux extrémiste lorsqu’il appelle les
chrétiens à réagir ensemble contre l’islamisme fanatique. Mais lui répond avec
humour : « Il ne se passera rien de grave avec l’Islam au cours du
XXIe siècle. Rien. La France est au mieux de sa forme, l’Europe va très
bien-merci. Dormez en paix. Fermez la télé. Lisez les Inrockuptibles. »[26]
Dantec
dépeint dans plusieurs de ses romans (Babylon
Babies, Cosmos Incorporated, Grande
Jonction,…) la société de ‘l’Human
Being Incorporated’ à venir. La première caractéristique de ce nouveau
monde c’est la toute puissance d’une nouvelle religion globale fondée sur un
seul logo (on ne parle plus de dogme à l’époque de Google[27] et
des cyborgs, ces hommes-machines truffés d’implants) : « UniMonde
Humain : Un Monde pour Tous, Un Dieu pour Chacun, Univers Humain
Uni ». Dans cet univers de l’UMHU règne la métastructure, ou Matrice, et
son organe de contrôle médico-totalitaire, le Conseil de Vigilance Ethique. Dans
Villa Vortex, Dantec ajoute que,
malgré tout ce qu’on en a dit, les gnostiques ont gagné finalement la bataille
des esprits. « L’hérésie était tout bonnement la plus puissante Eglise du
monde ».[28] Difficile d’admettre
cette nouvelle demi-vérité, même si on connaît les tirages du Da Vinci Code partout dans le monde.
La
Matrice, Antéchrist postmoderniste, est selon Dantec, « le système
d’intelligence méta-collectif de l’humanité-marchandise. Elle possède plusieurs
avatars comme la Machine, sa configuration mécanique et socio-technique,
l’Opinion, son relais médiatico-statistique, ainsi que « hyperpub.com, son
bras transindustriel qui combine l’édition, la publicité, la télévision, le
cinéma, les technologies informatiques, le câble, le téléphone, internet,
l’espace satellitaire, le rock et la production de drogues récréatives. »[29]
Lentement cette Matrice prépare le positivisme eugéniste et le traçage
bio-technologique des individus. L’adoption en France en octobre 2007 d’une loi
obligeant de passer des tests ADN obligatoires pour les regroupements familiaux
d’étrangers n’a fait que confirmer une tendance de fond en Europe.
La
Matrice n’hésite pas, si sa chaîne agro-alimentaire l’exige, à nourrir les
bœufs de farine animale, et à obtenir au besoin un agrément de la Commission de
Bruxelles. La Matrice favorise également l’émergence de « la figure
androgyne et hermaphrodite d’un humanoïde social parfaitement asservi » à
ses maternelles réjouissances.[30]
Dantec prend l’exemple des campagnes de publicité de l’entreprise Benetton.
L’idéologie de United Colors of Benetton, « à laquelle adhère désormais le
Canada tout entier », met en scène un homme-femme post-moderne
« tolérant tout et surtout l’intolérable, ne discriminant rien, donc
restant dans l’incapacité de rendre la justice, ne sélectionnant rien, donc ne
pouvant prétendre à aucune souveraineté, ne hiérarchisant rien, donc faisant fi
de la véritable liberté, ne choisissant rien, sinon le relativisme absolu, donc
la discontinuité hyperstable de la marchandise (…). »[31]
La
seule puissance politique qui lui résiste encore au XXIe siècle sont « les
Emirats islamiques d’Europe occidentale » et quelques enclaves comme le Vatican et un lieu désigné Grande Jonction en
Amérique du Nord. Les esprits libres, comme par exemple l’un des héros vivants
de Dantec, Mirko Djordjevic, un écrivain serbe orthodoxe, ne peuvent subsister
qu’en se cachant dans des souterrains et en protégeant des « bibliothèques
de combat ontologique ». Ils luttent en éduquant leurs enfants à lutter
contre « la Dévolution, le mal incarné de la régression hyper
nihiliste ».
Ils
inventent aussi un érotisme aristocratique, théâtre d’une nouvelle beauté,
réservé aux seuls amants du Royaume à venir. Les codes corporels sont la
substance d’une culture nous dit Rowan Williams. L’archevêque de Canterbury
partage l’analyse de Dantec sur la crise de la société moderne de plus en plus
violente à mesure qu’elle se sur-érotise. Il écrit : « L’agacement
devant ce qu’on prenait pour des conventions arbitraires, et la conviction
caractéristique de notre temps, que chacun de nous a un moi caché dont il se
doit de cultiver l’expression authentique, ont abouti à un étalage de barbarie
et de chaos. Dans le domaine de la sexualité notamment, la disparition rapide
des ‘codes’ s’est traduite non point par une liberté érotique paradisiaque,
mais par l’avènement d’une société plus préoccupée voire obsédée de sexualité
que la plupart des sociétés ‘pré-modernes’. Maltraitance enfantine, harcèlement
professionnel, rendez-vous amoureux qui virent à la ‘tournée’, autant de
marques d’une situation dans laquelle le ‘langage corporel’, comme nous
l’appelions sans réfléchir, est incapable en réalité de servir de structure de
communication parce que nous n’avons pas de sens commun (ni guère de sens tout court) de ce qu’est la sexualité. (…)
Si mon corps veut dire ce que moi je veux qu’il dise, et votre corps ce que vous
voulez qu’il dise, alors la peur d’un conflit entre deux systèmes de
signification, étrangers l’un à l’autre et arbitraires, dans une rencontre
sexuelle, sera d’autant plus grande. La confiance sexuelle, comme n’importe
quel autre genre de confiance, comme le miracle social, disparaît. »[32]
Seule
chez Dantec une métamorphose, ‘un méta-processus miraculant peut surgir pour
venir briser le cycle de l’hyperstase marchande’. Or la grande découverte est
la suivante : La machine est un réseau de coupures, rien de plus. C’est en
se plongeant dans la profondeur de notre être, relié à la structure divine des
Séphiroths, que nous parviendrons à la maîtriser. Car nous aurons retrouvé, via
cette plongée dans notre néant opératif ou créateur, « instrument de
coupures de flux », notre relation au Dieu vivant et à travers Lui, notre
corporéité commune. Il ne restera plus aux héros de Dantec de riposter contre
la dévolution : La Métastructure s’effondrera face au principe d’individuation
de la matière.
Dans
le langage des Pères de l’Eglise cela se disait ainsi : « faire
eucharistie en toute chose ».
Les théories scientifiques dans
l’univers de Dantec
Dantec, illuminé par le Livre des Séphiroths, par le
gnostique français Raymond Abellio, mais aussi par toute une tradition
patristique qui inclut Grégoire Palamas, dispose d’une proposition fascinante.
Notre corps est voué à se transfigurer. Cet appel est inscrit au plus profond
de nos gènes.
Cette
thèse repose sur une pensée eschatologique. Pour Dantec l’instant t du Big Bang n’est pas le commencement
du temps, il est plutôt le point de contact entre l’éternité et la temporalité
telle que définie par Aristote, c'est-à-dire comme une succession d’instants. Le
monde est constitué d’une multitude de surplis, un multiplex de dimensions à
l’œuvre à chaque instant. La fin du monde est donc « présente partout,
toujours, sous une forme qu’on nommera ‘potentielle’, et elle s’actualisera
lors d’un moment ineffable, car hors du temps lui-même puisqu’elle le clôturera
aux limites de l’infini. »[33] Il
faut lire les ouvrages de Besarab Nicolescu, tel que Nous, la particule et le monde, pour se convaincre que cette approche,
qui intègre la théorie du big bang mais sans l’absolutiser, dispose de nombreux
partisans parmi les astro-physiciens contemporains.[34]
Dantec
puise également à la cosmologie de l’Ecole des astro-physiciens de Princeton
(Jeremiah P. Ostriker, Paul J. Steinhardt, Robert Caldwell, etc…)[35], à
la théorie des cordes, de la supersymétrie et du Bootstrap, pour présenter sa
propre théorie du facteur anthropique comme processus d’auto-développement de
l’univers. Ces savants rappellent dans leur théorie du Quintessential Universe que l’Univers est composé à 70% d’énergie
sombre (non régie par la loi de la gravitation), 26% de matière sombre, et
seulement 0,5% de matière ‘ordinaire’ visible. Dans cette approche, le cosmos
« n’est pas un ‘réceptacle’ passif dans lequel sont suspendus des ‘objets’
sphériques, vaguement tournants et gravitant les uns autour des autres dans le
mouvement intangible des lois universelles de l’abstraction (…) Le cosmos est
un méta-système d’information, un espace-temps multi-dimensionnel à dix voire
onze dimensions.[36]
C’est
pourquoi, de façon analogue, Dantec se gausse des généticiens qui ne
s’acharnent qu’à décoder l’ARN et négligent le ‘Junk DNA’,
« méta-ordinateur quantique relié à toute l’information de
l’univers ». De la même façon que le cosmos n’a pas de sens sans son
énergie sombre, le code génétique pour lui n’est pas un ‘code’, mais la méta-forme
de la vie.[37] « L’ADN est mutable,
écrit Dantec, de nombreux gènes sont mobiles, on les appelle ‘transposons’.
Dans le Junk-DNA de nombreux transposons viennent en fait d’une
rétro-transcriptase ARN, c'est-à-dire de l’introjection d’informations
génétiques en provenance de l’extérieur. »[38]
Dès
lors nos vies ne sont pas réglées par le hasard comme l’affirmait le biologiste
Jacques Monod, ni par un Dieu mécanicien qui passerait son temps à regarder ses
jouets et à les remonter, comme la pensée de Newton l’a cru. « Nos vies
sont réglées par nous-mêmes, et de cela il nous est précisément tenu compte, au
sens strict, au moment où la conscience se ‘sépare du corps’ mais en fait pour
s’y réunir, sous une autre forme, un autre plan d’énergie quantique. »[39]
Ebauche de l’anthropologia gloriae
dont on se remet à parler dans les souterrains de France...[40]
Dans
cette vision nuptiale de la création on trouve enfin la réponse à la
représentation néo-darwinienne de l’évolution dont la principale
caractéristique est de distinguer radicalement la vie de la conscience de celle
des gènes. Richard Dawkins, biologiste éminent, est le représentant de ce
courant ultra-moderne de la biologie agnostique voire athée. Le savant
britannique a même mis au point en 1976 la thèse du gène égoïste dont l’axiome
principal est le suivant : Les individus sont des artifices que les gènes
ont inventés pour se reproduire.[41] Si
les organismes vivants sont les machines de survie des gènes, la sexualité
devient le principe des principes permettant de reformuler la classification
des espèces.
Mais
au même titre que Michel Foucault avait relié ensemble dans sa vaste
épistémologie du savoir moderne les opérations du classement, de l’échange, du
discours et de la représentation,[42]
l’archéologie du savoir de l’époque œcuménique bouleversera ensemble ces 4
modes d’intelligence. Dès la fin du XIXe siècle Vladimir Soloviev avait préparé
son avènement. Il avait critiqué à la fois, et sur la même base sapientielle,
les bases de la philosophie kantienne, l’économie politique de Karl Marx, les
thèses esthétiques de Tchernychevski, et la théorie de l’évolution de Darwin.
Pour Soloviev, le sens de l’amour sexuel ne réside pas dans la reproduction de
l’espèce, mais dans la constitution d’un « organisme supérieur »[43]. Ce
n’est pas la sexualité qui doit être pour les anthropologues la source de la
classification, mais la capacité à aimer. On retrouve ici le paradigme de
l’amour, célébré aujourd’hui par Benoît XVI, Jean-Luc Marion ou Christos
Yannaras, comme basculement de la post-modernité à l’âge oecuménique. Cette
aptitude ou ce rejet de l’amour peut prendre différentes formes, sur le plan
des organismes génétiques, de la mutation à la sélection ou à la migration.[44] On
se rapproche ici de ce que Bulgakov avait en vue lorsqu’il comprenait la
Sagesse de Dieu comme une conscience non hypostatique, capable d’aimer, sans
pour autant être doté de la conscience de soi hypostatique. Son principal
argument face aux attaques de tous les zélotes de la norme, hostiles à la
notion de conscience non personnelle, était de recommander la lecture du livre
des Psaumes, particulièrement ceux qui rappellent que toute la création loue le
Seigneur.[45]
Pour
Dantec, autre héritier de Soloviev, le phénomène de rétro-transcriptase de nos
gènes (le retour de l’ARN vers l’ADN, c'est-à-dire du code vers sa source) doit
être compris comme un phénomène de mort et de cheminement vers la résurrection.
Dans Villa Vortex il détaille
l’action des rétro-transposons. « Car le rétro-transposon – médiateur du
code – subissait lui aussi le ‘burst transpositionnel’, et dans cette double
hélice de la vie et de la mort, du temps et de l’éternité, de l’entropie et du
destin, une mémoire absolue, cosmogonique, éternelle et infiniment physique
surgissait et glorifiait alors qu’elle quittait, comme un troisième terme qui
abolirait en les synthétisant toutes les précédentes dialectiques entre corps
et esprit, puisque le corps était la lumière de l’esprit, comme l’esprit était
la lumière du corps. »[46] Et
la résurrection du Christ est certes l’œuvre de l’amour trinitaire, mais elle
peut être comprise biologiquement comme « une illumination par burst retro-transpositionnel
général »[47]. On pense à l’œuvre de Nikolai
Fiodorov, ce bibliothécaire génial de Saint Pétersbourg que venaient voir
Dostoievski, Soloviev et Tolstoï, et qui rappelait à temps et à contre-temps
que le Christ a donné aussi aux hommes le pouvoir de ressusciter les morts.
Quant
à la Dormition de la Vierge, elle est présentée dans Cosmos incorporated comme « une élévation métamorphique du
corps-esprit qui peu à peu, devient lui-même Lumière, en tant non pas que pur
‘esprit’ mais corps-esprit surphysique, comme Corps Glorieux, là où Chair et
Lumière sont à la fois unies et disjointes, comme les natures divine et humaine
du Christ. »[48] Il y
a ici une reprise des intuitions les plus profondes de la sophiologie russe. Le Buisson ardent du père Serge
Boulgakov, traité théologique dédié à la Vierge Marie et fondé sur
l’interprétation icônique de la Vierge en tant que Sagesse de Dieu, trouve dans
l’œuvre de Dantec son équivalent littéraire.[49]
Dantec,
qui a lu le livre du Zohar mais aussi les travaux du Centre International de
Recherches et d’Etudes Transdisciplinaires (CIRET), s’inspire de théories
mathématiques récentes « qui s’entendent sur un univers à dix dimensions
plus un ‘univers-interface’, onzième dimension qui se meut à leur
(dis)jonctions »[50].
Pour Dantec, il s’agit là des dix séphiroths de l’arbre kabbalistique. C’est
pourquoi il réhabilite la Kabbale (tout comme Annick de Souzenelle)[51] et
avec elle de grands kabbalistes chrétiens comme l’alchimiste Pic de la
Mirandole et l’astro-physicien Giordano Bruno. Dans Villa Vortex, il écrit : « l’arbre des Séphirots c’était
donc l’homme réuni, l’homme intégral,
l’homme auquel Nietzsche avait rêvé. La Couronne suprême Kether, celle par qui
l’En-Sof, principe inconnaissable de
YHVH, prenait corps dans l’Univers (et dans l’Homme ce Multivers vivant),
évoluait en forme de spirale, voire,
pour certaines illustrations plus complètes, en forme de double spirale. Une spirale partait du cerveau de l’Adam Kadmon
pour rejoindre le feu pur de l’inconnaissable, sa figure corrélative descendait
du feu pur de l’inconnaissable pour s’incarner, via son cortex cérébral, dans
la créature de Dieu. »[52]
Dantec
distingue le corps, organisé selon le corps glorieux trinitaire, de l’organisme
qui actualise le Je métabiologique.
« Les deux cerveaux gauche et droit reproduisent sur le plan organique la
mystérieuse complexité de la Tri-unité, basée sur le surpassement du
dualisme : les deux cerveaux n’en forment qu’un et pourtant ils sont
trois. »[53] Il convient de compléter
probablement cette anthropologie par une théo-poétique du corps comme le
recommande Olivier Clément. Car toute la tradition hésychaste le dit :
sans jeûne, ni prière il n’y a aucun moyen de se libérer des passions de l’âme.
« La distance entre le ‘causal’ et le ‘symbolique’, entre l’étant et le
sens, est celle-là même du jeûne. Du regard vorace sur une pomme à la bouche
broyeuse il n’y a qu’un instant. Du regard attentif à la pomme peinte par
Cézanne, il y a l’ouverture au mystère. Du regard approfondi par la prière à la
même pomme, il y a transformation du mystère en rencontre avec le Souffle
donateur de vie et de beauté. Le jeûne comme attitude globale favorise la
révolution copernicienne de la métanoïa : chaque créature perçue comme une
parole du Créateur, s’ouvre sur l’infini. »[54]
Dès
lors on comprend pourquoi toute l’œuvre de Dantec est parsemée de présences
angéliques (Vivian Mc Nellis, Lucy Skybridge, Métatron), tantôt célestes,
tantôt déchues, un peu comme dans les films de Wim Wenders. Il y a aussi une
temporalité spécifiquement angélique, l’aevum,
« ce Temps créé mais infini », « discret, non
continu », que Dantec trouve chez saint Thomas et saint Bonaventure. La
voix qu’entend Plotkine à l’hôtel Laïka lui révèle même la nature profonde des
chérubins et des séraphins : « Nous les anges, nous sommes la
technologie de Dieu. Créés mais infinis, notre temps est bien celui de la
Monade, nous sommes la boîte noire de Dieu, car cônes d’induction cognitive,
intellects-agents ni séparés ni simples extensions de l’Unique, mais toujours
synthétiquement disjoints à Lui, nous sommes fermés/ouverts, nous sommes des
champs quantiques dont l’individuation n’émerge qu’à la coupure de toutes les
coupures, comme dans le point pivotal de notre temps machine, là où tout est
nombre, là où tout est code, là où tout paradoxalement, devient présence
manifeste. »[55]
La synthèse doxologique rock de Maurice
Dantec
Maurice G. Dantec, amateur des Pink Floyd, Roxy Music
et de Björk, héritier du renouveau de la pensée chrétienne contemporaine, tente
une synthèse musicale entre Duns Scot et la pensée contemporaine : Seule
la Voix, la Parole en acte, le Chant électrique, est capable selon lui de
combattre la dévolution du Logos par le prince de ce monde.
Dantec
est un amateur du rock pur, du rock considéré comme style de vie, et non comme
l’un des véhicules de la société de consommation. Il a été bercé dans les
années 60 par James Brown et John Lennon, Bob Dylan et Barbara. Il a suivi les
méandres de l’Internationale Situationiste, lu Reich, Mao et Marcuse. Il a
fréquenté enfant une « communauté post-hippie Mao dure à cuire mais
tendance anti psychanalyse ».[56] Au
début des années 70, alors que toute sa classe écoute Joan Baez et Simon and
Garfunkel, lui se démarque en écoutant Led Zeppelin, David Bowie, les Beatles,
les Who, et en lisant Henri Michaux, Rimbaud et Edgar Poe. C’est à ce moment-là,
lorsque la guerre froide aurait pu se transformer en nouvelle conflagration
atomique planétaire, que Dantec lit Nietzsche et commence sa consommation de
haschich et de LSD. Puis il a été punk dans les années 1977-80 (Sex pistols et
Clash côté musique, Burroughs et Lautréamont côté livres) contre la contre-culture
hippie. Mais il s’est très vite éloigné d’un courant récupéré très tôt par
« les néo-bourgeois post-babas » préférant Téléphone aux Dogs. Il
entre alors dans une période nihiliste et se détruit la santé à force drogues
et hallucinogènes en écoutant Stan Ridgway (The Big Heat).
Survient
alors un « baptême de feu » sur lequel Dantec reste pudique,
événement personnel et intime qui le conduira lentement à demander à l’Eglise
la matérialisation par l’eau et par l’huile de sa rencontre avec le Christ. Il
a été ému également par la mort de son père qu’il a vu réduit en une petite
urne de cendres. Lors de ses adieux avec son père au cimetière il esquisse
une prière : « Mon signe de croix s’est très étrangement, et dans la
simplissime fluidité des actions de grâce, terminé par ce geste des musulmans
qui font se rejoindre le cœur et la bouche, en signe de reconnaissance envers
l’Amour dont le Verbe nous a doté. »[57]
Dantec
dût alors franc hir de nouveaux
obstacles. Il faut lire les pages de ce chercheur de Dieu racontant ses nuits à
écouter l’album Whore de Dalbello qui chante « Don’t save my soul,
Don’t raise my hope ». Grâce à Dalbello, Björk, PJ Harvey, Annie Lennox,
femmes-elfes, Dantec voit l’émergence d’une nouvelle créativité musicale dans
le rock contemporain, dernier espoir face à l’avalanche de musiques décadentes
telles que la « techno décérébrante », la « house métronomique »
et le « rap gangstérisé ». Dantec est conscient que devenir chrétien
n’est pas se mouler dans un sac de certitudes portées par d’autres. « Sa
présence, écrit-il à propos du Christ, demande le sacrifice de l’âme humaine,
de sa ‘conscience’, dirions nous aujourd’hui, en échange d’une véridique
Connaissance sur nos devenirs cosmobiologiques. (…) il ne peut y avoir Annonciation sans Résurrection, il ne
peut y avoir Vérité sans Amour. »[58]
L’écoute
des albums d’Oasis, de Primal Scream, de U2 lui fait dire que cinquante après
sa naissance le rock n’ roll est mort, tout comme la révolution permanente
issue des grandes secousses existentielles du XXe siècle. Pourtant le « I
begin to wonder » de Dani Minogue pousse Dantec à formuler cette nouvelle prière :
« Ouvrez votre cœur sacré, Seigneur, je vous prie, à ces êtres plus tout à
fait terrestres, qui par la violence de leur authentique sensualité et la grâce
d’une beauté qu’on devine plus qu’humaine (…) peuvent redonner à nos existences
l’impression si sublime, si indicible, qu’elles sont bien une vie, ah oui, Vous
qui régnez sur tout ce qui en nous peut nous rapprocher d’une véritable émotion,
prenez sous votre aile de colombe ces femmes nuits-blanches… »[59]
Dantec
a pris alors conscience de l’intuition qui le conduisait depuis ses premiers
albums de Jimi Hendrix : « En Amérique, le verbe s’est électrifié (…)
le Verbe se dédouble dans l’Electricité, elle-même face provisoire que prend
notre rapport avec les PHENOMENES qui émergent du méta-événement toujours
renouvelé, toujours en état d’advenir. »[60]
Comme si la matière trouvait une extase dans la gerbe électrique (Hello). De
cette prise de conscience naîtra la trame de son roman Grande Jonction. La Matrice, vaincue grâce à l’amour et au baptême
du héros dans Cosmos incorporated,
renaît de ses cendres en s’attaquant au langage et aux nombres. Cette fois-ci,
ce sera la musique électrique d’un enfant, Link de Nova, sorte de fol en Christ
des temps apocalyptiques, qui rendra possible le salut, la victoire sur la
numérisation absolue, par le saut quantique qu’elle induit, le Bootstrap.
Ceci
est compréhensible selon Dantec si l’on retrouve la profondeur de la pensée de
Duns Scot et de son principe d’individuation. Ce principe nous permet « de
rester des Images du processus même de la Création divine », des monades
situées sur des « lignes de synthèse disjonctive » interfacées aux
autres plans de l’Etre. Dantec distingue Duns Scot des nominalistes. Il s’agit
là d’une vue que ne partageait pas le théologien catholique Marie Joseph Le
Guillou. Ce dernier écrivait dans Le
Mystère du Père : « En plaçant la liberté inconditionnée comme
identique à l’essence divine, Duns Scot a automatiquement extériorisé la
création par rapport au Créateur, dont elle ne révèle pas les perfections de ce
qu’Il est mais de ce qu’Il veut. »[61] Le
père Serge Bulgakov remontait quant à lui à saint Thomas d’Aquin pour situer la
limite de la sophiologie occidentale : sa trop grande dépendance à l’égard
de la définition aristotélicienne et panthéiste de la relation entre Dieu et le
monde.[62]
La
philosophie du nom de Dantec est bien plus convaincante en revanche :
« En acquérant le pouvoir de Nommer, l’homme devient capable de séparer
les êtres de leur être, il devient capable de les anéantir en tant qu’êtres,
pour les faire renaître à l’infini, et plus précisément encore pour détruire ce
qui dans leur être fait vivre la mort, ce qui s’obstine à vivre dans
l’ignorance, la discontinuité partielle, entropique et l’illusion. »[63] De
même Dantec rejoint Florensky et les sophiologues russes lorsqu’il s’appuie sur
la pensée du mathématicen allemand d’origine russe Cantor qui chercha à mettre
en relation les intuitions de Scot : « Ce sont les ensembles infinis
qu’on peut définir par une propriété positive, les ensembles finis ne pouvant
se définir que par la privation de cette propriété fondamentale. Ainsi
l’individuation n’est pas le résultat d’une action ‘accidentelle’, isolée dans
le temps et l’espace, et surtout pas réitérée indéfiniment, sur le mode de la
discontinuité numérique, mais un processus infiniment dynamique, un processus
non déterminé, échappant toujours au piège de la logique numérique du faux
infini, nominaliste ou aristotélicien, et qui, au contraire, détermine la
nature commune de l’humanité. Plus encore c’est par sa Liberté, individuation
de la Liberté divine, que l’Homme donne au monde créé sa réelle
détermination. »[64] Si
la structure profonde du vivant est liberté, et surtout si l’homme en prend
conscience, alors la rencontre des deux Sagesses créée et incréée, ne peut pas
ne pas se produire.
Il
faut lire le 21e chapître de l’Apocalypse en écoutant « I saved
the world today » d’Eurythmics.
Conclusion
Dantec
fut un lecteur attentif de la littérature russe, et plus particulièrement des
« mousquetaires cosaques de l’anti socialisme, Berdiaev, Chestov,
Soloviev, Leontiev ».[65] Les
héros de ses romans s’appellent Youri ou Plotkine et viennent de Sibérie.
Enfant il a appris le russe en première langue (héritage paternel), admiré le
Andrei Roubliov de Tarkovski, lu les contes des princes de Kiev, Pouchkine et
Tolstoï. Adulte il a eu une fascination pour le christianisme oriental au point
d’avoir été tenté de demander le baptême dans l’Eglise orthodoxe[66] puis
dans l’Eglise catholique orientale (maronite). Il a voyagé dans les pays de
l’Est et jusqu’en URSS.
Lorsque
se déroule la révolution orange en Ukraine il s’enthousiasme. Très vite cependant
le tsunami de Noël 2004, relayé par les médias de l’UniMonde Uni, détournera l’attention
du monde de la Révolution de l’Esprit qui se produisit sur la place Maidan au
cours de l’hiver 2004. Emporté une nouvelle fois par sa plume de polémiste,
Dantec ira même jusqu’à croire que les peuples de l’Est ne veulent pas de
l’Union Européenne.[67]
Or
les Ukrainiens se définissent bien comme Européens et souhaitent intégrer dans
leur très grande majorité une communauté politique qui a su, malgré tout ce
qu’on peut lui reprocher, générer depuis 60 ans, de la paix, de la prospérité,
et du respect pour les droits de l’homme. Ils l’ont prouvé en 2014 lorsqu’ils
ont combattu une nouvelle fois sur la place Maïdan de Kiev contre le régime néo-soviétique
et corrompu de Victor Yanoukovytch et pour la signature du traité qui les
associait à l’Union européenne.
Je
n’ai pas eu le temps de convaincre Maurice G. Dantec que la formation de l’Etat-nation
ukrainien était une avancée de la civilisation en Europe. Aujourd’hui, je le
regrette et je pleure le départ de ce grand écrivain. Mais, en imaginant son
entrée au ciel, je me réjouis aussi de la fin de ses souffrances physiques. Et de
sa participation lumineuse au grand banquet rock du Royaume qui vient…
Antoine Arjakovsky, le 28.06.2016
Antoine Arjakovsky, le 28.06.2016
[1] Parmi
ses principaux ouvrages on recommandera ses journaux comme Le théâtre des opérations en 3 volumes (2000, 2001 chez Gallimard, American Black Box, 2007 chez Albin
Michel) et ses romans : Les racines
du mal (1995, Gallimard), Babylon
Babies (1999, Gallimard), Villa
Vortex (2003, Gallimard), Cosmos incorporated
(2005, Albin Michel), Grande Jonction
(2006, Albin Michel), Artefact (2007,
Albin Michel), etc…. Son dernier ouvrage Les
Résidents est paru en 2014 chez Inculte (en 2016 chez Actes Sud).
[2] Il
tempère aussi l’illusion que, à l’époque des départements marketings
surpuissants des maisons d’édition, ce serait les lecteurs qui comme autrefois feraient
les auteurs…
[3]
Dantec, Laboratoire 2, op. cit., p.
41.
[4]
Dantec, Laboratoire 3, op. cit., p.
50.
[5] Artefact, op. cit., p. 308.
[6]
Charles Taylor, Le malaise de la
modernité, Paris, Cerf, 2002.
[7] M.G.
Dantec, Laboratoire de catastrophe
générale, Paris, Gallimard, 2001, épigraphe de P. Dick.
[8] Ibid,
p. 58-59.
[9] Il faut dire que réciproquement seuls
quelques auteurs comme Jean-François Revel ou Philippe Muray ont trouvé grâce à
ses yeux.
[10] John
Milbank, ‘Paul against Biopolitics’, conférence prononcée lors du colloque de
l’Institut d’études œcuméniques de Lviv ,
UCU, sur le mouvement Radical Orthodoxy. Cf www.ecumenicalstudies.org.ua
[11]
Dantec, Laboratoire 2, p. 183.
[12]
Ibid, p. 265.
[13]
Laboratoire 3, p. 34.
[14] Adrian Pabst , Olivier Thomas Venard, Radical Orthodoxy, Pour une révolution
théologique, Genève, Ad Solem, 2004
[16]
Mireille Delmas-Marty, ‘Construire les conditions d’un droit universel’ dans le
chap. 14. ‘A la recherche d’une gouvernance mondiale’, Sortir de l’économisme, sous la direction de Philippe Merlant,
Paris, Ed. de l’Atelier, 2003, p. 195.
[17] Delmas Marty, op. cit., p. 198.
[18]
Olivier Clément, Rome autrement, Paris,
DDB, 1997, p. 120 ; Rowan Williams, Icônes
perdues, Paris, Cerf, 2005 ; cardinal Joseph Ratzinguer, L’Unique alliance de Dieu, Paris, Parole
et Silence, 1999.
[19]
Légèrement nuancé dans American Black Box,
op. cit., p. 160. Pour Dantec l’islam reste cependant une hérésie chrétienne
qui n’a pas de sens historique. Il envisage pourtant une alliance possible
entre chrétiens et musulmans contre l’intégrisme islamiste et les divers
nationaux socialismes. (Laboratoire 2, p. 549)
[22]
American, op. cit., p. 470.
[23] Laboratoire 2, p. 518
[24] Laboratoire 2, op. cit., p. 453.
[26] Ibid, p. 398.
[27]
Barbara Cassin a démonté la logique missionnaire et manichéenne de l’entreprise
Google et qui aboutit à une ‘démocratie des clics’ et à un déni de toute
responsabilité : « Notre mission est d’organiser toute l’information
dans le monde » et « Ne sois pas méchant ». Barbara Cassin, Google-moi, Paris, Albin Michel, 2007.
[28] Villa Vortex, op. cit., p. 419.
[29] Laboratoire 2, op. cit., p. 271.
[30] Laboratoire 2, p. 318.
[31]
Ibid, p. 797.
[32] R.
Williams, Icônes perdues, Paris,
Cerf, 2005, p.250
[33] Vers le Nord du Ciel, op. cit., p. 125.
[34]
Basarab Nicolescu, Nous, la particule et
le monde, Paris, Editions du Rocher, 2002.
[35] Jeremiah P. Ostriker et Paul J.
Steinhardt, « The Quintessential Universe », Scientific American, jan. 2001.
[40]
Jean-Yves Lacoste, Expérience et Absolu,
Paris, PUF, 1994, p. 233.
[41]
Richard Dawkins, Le gène égoïste,
Paris, Armand Colin, 1990 (1976).
[42]
Michel Foucault, Les mots et les choses,
Paris, Gallimard, 1966.
[43]
Vladimir Soloviev, Le Sens de l’Amour,
Paris, ŒIL, 1985, p. 18.
[44]
Pierre Henri Gouyon, Jean-Pierre Henry, Jacques Arnould, Les avatars du gène, Paris, Belin, 1997, p. 196.
[45]
Serge Boulgakov, La Sagesse de Dieu,
Paris, L’Age d’Homme, 1990.
[46] Villa Vortex, op. cit., p. 511.
[47] Ibid, p. 109.
[49]
Serge Boulgakov, Le Buisson Ardent,
Paris, L’Age d’Homme, 1990.
[50] Ibid, p. 95. Le physicien
Garrett Lisi travaille sur un univers à 8 dimensions. Cet américain a proposé
en octobre 2007 une nouvelle théorie du tout associant la physique de la
mécanique quantique avec l’astro-physique, la théorie de la gravitation régie
par la théorie d’Einstein sur la relativité générale. Son approche est
géométrique. On classe les objets physiques selon les symétries qui les
caractérisent, via par exemple le groupe de Lie E8 qui inclut l’infiniment
petit et l’infiniment grand. En connaissant toutes les symétries de la figure,
on connaît toutes les équations de la théorie. Exit le vieux débat entre
théorie des cordes et théorie des boucles. Toute la structure de notre univers
se trouve dans un polyèdre de 8 dimensions et 240 sommets. Cette théorie est cependant
vivement contestée par les milieux académiques.
[51]
Annick de Souzenelle, Le symbolisme du
corps humain, Paris, Albin Michel, 1991.
[52] Villa Vortex, op. cit., p. 421.
[53]
Ibid, p. 133.
[54]
Olivier Clément, Corps de mort et corps
de gloire, Paris, DDB, 1995, p. 57
[58] Ibid, p. 727.
[59] American, op. cit., p. 397.
[60] American, op. cit., p. 505.
[61] M.J.
Le Guillou, Le Mystère du Père,
Paris, Cerf, 1973, p. 126.
[62] S.
Bulgakov, L’Epouse de l’Agneau,
Paris, L’Age d’Homme, 1984, p. 24.
[63] Villa Vortex, op. cit., p. 693.
[64] Grande Jonction, op. cit., p. 548.
[66] Ibid, p. 190.